Forum à Chalon sur l’organisation
hospitalière du nord de la Saône-et-Loire
Ce mardi soir, la salle Marcel Sembat à Chalon-sur-Saône accueillait un débat public, qui en a intéressé plus d’un, puisque la salle était remplie.
Le forum d’informations et d’échanges sur l’accès aux soins au nord de la Saône-et-Loire avait été organisé à l’initiative de l’Union Départementale des Associations Familiales (UDAF) de Saône-et-Loire, avec le Soutien de la Conférence Régionale de la Santé et de l’Autonomie (CRSA) et de l’Agence Régionale de la Santé (ARS) de Bourgogne.
Cette soirée avait pour but de permettre le dialogue entre les acteurs de la Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) Saône-et-Loire Nord Morvan : élus, praticiens, responsables, représentants du personnel hospitalier et représentants des usagers. La soirée était ouverte à tous.
Pour rappel, cette CHT a été officiellement constituée le 10 février dernier. Elle regroupe les centres hospitaliers d’Autun, Chalon-sur-Saône et Montceau-les-Mines, ainsi que l’Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) d’Epinac.
Les personnes présentes ont pu échanger avec Christophe Lannelongue, Directeur général de l’ARS Bourgogne, Françoise Tenenbaum, Présidente de la CRSA, Bruno Legourd, Directeur de la CHT, ainsi que les Présidents des conseils de surveillance des hôpitaux concernés, Rémy Rebeyrotte (Autun), Gilles Platret (Chalon-sur-Saône) et Marie-Claude Jarrot (Montceau-les-Mines).
La CHT, c’est quoi ? Piqûre de rappel
La Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) est un outil de coopération permettant l’élaboration d’une stratégie et d’une gestion commune d’activités et de fonctions avec pour socle un projet médical partagé.
Comme la CHT n’a pas de personnalité juridique, elle ne se substitue pas aux établissements. Elle leur donne les moyens de renforcer leur attractivité médicale en valorisant respectivement leur expertise.
Sur le plan logistique, la coopération entre les établissements doit permettre de mutualiser les fonctions-supports, de rationaliser certaines dépenses d’achat et de fonctionnement, d’optimiser les plateaux techniques.
En Bourgogne, la CHT Saône-et-Loire Nord Morvan est la deuxième Communauté Hospitalière de Territoire mise en place, après la CHT Sud Yonne. A moyen terme, ce devrait être six CHT qui devraient dessiner le paysage hospitalier de la région, soit une par territoire de santé (Côte-d’Or, nord Saône-et-Loire, sud Saône-et-Loire, Nièvre, sud Yonne, nord Yonne).
Ces CHT sont présentées comme préfigurant les Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT) en discussion dans le cadre de la loi de santé.
L’avis des initiateurs de la CHT
Dès le début de la soirée, les initiateurs de la CHT ont été invités à s’exprimer sur le projet et ses enjeux.
Pour Gilles Platret, Maire de Chalon-sur-Saône et Président du Conseil de Surveillance de Chalon, « On est en train de coordonner une offre, un projet. En pensant une idée à travers une communauté, on travaille dans l’intérêt général » a-t-il déclaré.
Et d’ajouter : « C’est le moyen de peser dans le paysage hospitalier bourguignon et de le rééquilibrer un peu. Nous avons un moyen de faire durer nos établissements en s’engageant dans l’avenir pour toute notre population. Car il y a un enjeu démographique important sur notre territoire. » a-t-il ajouté.
Françoise Tenenbaum, Présidente du CRSA a déclaré pour sa part que « Le débat avec les acteurs de la santé, les directeurs des établissements, les professionnels de santé et les usagers, c’est cela la démocratie en santé. On a tout le champ de la santé : le sanitaire, le médico-social etc. Et on a besoin du social. Ce qui est déterminant dans le société, ce sont le logement, le transport, la qualité de l’air, l’environnement. Et cela rentre dans la santé globale vue par l’OMS [Organisation Mondiale de la Santé] ».
Et d’ajouter : « Cette démocratie en santé a fait des progrès depuis 2002 et la loi Kouchner. Les CHT sont importantes pour dessiner la santé de demain. ».
Faisant suite aux propos de Françoise Tenenbaum, Bernard Desbrosses, Président de l’UDAF 71, a tenu à rappeler le rôle de l’association dans la représentation des familles auprès des associations. Il a notamment indiqué que l’UDAF comptait 17 représentants santé au niveau du département.
Il a également rappelé les trois réunions préparatoires qui se sont tenues ces derniers mois : la première à Blanzy, puis les deux autres à Autun et à Chalon-sur-Saône. Le but affiché de ces réunions était clairement de préciser les modalités de la CHT aux usagers.
Des vidéos pour introduire la CHT
La soirée s’est poursuivie avec deux courtes vidéos pour introduire la CHT.
La première vidéo insistait notamment sur le souci de garder des lieux de soins de proximité « pour soigner la population au bon endroit, au bon moment et faciliter le parcours du patient ».
Annick Giraudet, responsable de la commission santé à l’UDAF 71, a présenté les résultats de deux enquêtes : l’une a été effectuée lors de bourses aux vêtements auprès de 300 personnes et l’autre auprès de 100 personnes (par des étudiants de licence pro de l’IUT de Chalon-sur-Saône).
Ces mêmes étudiants ont réalisé une courte vidéo (la deuxième diffusée), témoignage des inquiétudes des usagers à qui l’on indiquait l’existence de la CHT, sans leur présenter les détails du projet. Et les craintes se portaient majoritairement sur la gestion des déplacements entre sites, la distance entre les habitants ruraux et les établissements. Une pharmacienne interrogée s’inquiétait pour les personnes âgées, déclarant « Quand on est âgé, on a une adaptabilité moins importante. »
Un autre protagoniste du film ajoutait « On va pas dans le sens du service, mais dans le sens de l’économie ».
Les résultats des enquêtes présentés par Annick Giraudet recroisaient partiellement ces témoignages. Sur la question des difficultés rencontrées en milieu hospitalier, les personnes interrogées ont rapporté majoritairement des problèmes de transport, de stationnement et avec les urgences. Les personnes âgées et handicapées ont rapporté des difficultés relationnelles avec les professionnels de santé. Également elles ont pointé du doigt la faiblesse des établissements au niveau des traitements psychologiques et psychiatriques.
Parmi les questions rapportées lors de ce forum, on a pu noter celle portant sur le suivi du dossier médical sur trois établissements différents et les craintes sur un processus jugé déshumanisant.
A l’issue de l’enquête, les attentes présentées portaient sur l’amélioration de la relation médecin/soignants, la conjonction sécurité/qualité/proximité et la mise en place du dossier médical partagé et sécurisé.
Quatre thèmes de propositions pour la CHT
Ainsi quatre thèmes de propositions ont été retenues : mieux accueillir et communiquer (organiser l’accueil du secteur des urgences, communication entre patient et professionnels), faciliter l’accès aux établissements (aménager les déplacements, gérer les sorties des patients, l’hébergement pour les proches etc.), innover, moderniser (via le développement de l’hospitalisation à domicile ou le développement de la télémédecine par exemple) et assurer le suivi (promouvoir le partage du dossier de soins sécurisé particulièrement).
Annick Giraudet a insisté sur la nécessité « d’intégrer les acteurs de la société civile aux réflexions stratégiques sur la mise en place de la CHT, de créer un dispositif de dialogue à l’échelle du territoire regroupant l’ensemble des acteurs concernés par la CHT et de favoriser la recherche de solutions construites avec les acteurs et les habitants ».
Échanges entre la salle et les initiateurs de la CHT
Parmi les personnes venues assister à cette soirée, on trouvait des représentants syndicaux, des représentants des usagers au sein d’associations, des élus des villes du territoire de santé concerné, des représentants de personnels hospitaliers etc.
En début de soirée, nous avons ainsi échangé avec Laëtitia Marceau, élue à Crissey, travaillant dans le domaine de la santé à l’hôpital privé Sainte Marie. Elle nous a indiqué que tous les maires avaient été conviés. Mais que ceux-ci préféraient envoyer leur référent santé, généralement une personne du domaine. « On a une meilleure compréhension et des compétences » a-t-elle indiqué.
Lorsque nous l’avons interrogée quant à son opinion au sujet de la CHT, elle a répondu « Au niveau du territoire, cela peut être positif, vue la conjoncture médicale. A Crissey, on est en voie de bâtir une maison de la santé pour regrouper médecin généraliste, kiné etc. On a une majorité de personnes âgées qui ont ce type de demande. Du point de vue de la CHT, la proximité joue un rôle important ».
D’ailleurs, c’est bien sur la problématique des différences démographiques et de la proximité que Christophe Lannelongue, Directeur général de l’ARS Bourgogne, s’est exprimé en réponse à une question de la salle. « Sur les différences démographiques, la Saône-et-Loire n’est pas un territoire homogène. On doit pouvoir être attentif à des délais d’accès comme pour le Morvan. En combien de temps doit-on pouvoir accès aux services d’urgence, à une maternité ? ».
Interrogée sur la question de la santé à Montceau-les-Mines, Marie-Claude Jarrot a pris le temps de répondre posément : « J’ai abordé la question de l’accès de la santé à la ville avec le calme. Le territoire de santé était agité. Nous avions besoin de détermination. Il fallait négocier avec l’ARS. C’était difficile. Avec les partenaires sociaux, il a fallu faire preuve de consensualisme. »
Sur la question du sens de la CHT pour Montceau-les-Mines, Madame le Maire a répondu : « J’espère qu’elle va apporter du dynamisme à l’hôpital de Montceau-les-Mines. Nous voulons une offre de soins équitables entre tous les hôpitaux. Il n’y a pas un hôpital principal. La coordination entre nous sera un atout majeur pour rassurer la population. Elle a besoin de savoir qui propose quoi et à quelle distance. Je veux dire aussi que la question de la maternité se pose. Je sais que la réponse n’est pas trouvée. Nous avons à être de bons élèves par rapport aux finances. Nous avons des engagements par rapport au retour à l’équilibre. Ce qui est à améliorer, c’est la communication à destination des médecins de ville qui n’orientent pas forcément vers l’hôpital le plus proche. Je crois que c’est un axe de travail dont nous devons nous emparer. »
Et de reprendre au sujet de la CHT : « Pour l’hôpital de Montceau, c’est une chance. Merci aux partenaires qui ont fait l’objet de sérieux et de confiance. Nous tiendrons nos engagements. Je veux dire aussi qu’il n’y a aucun opposition, ni de guerre avec la fondation de l’Hôtel Dieu du Creusot. Il y a une offre pour le public et pour le privé. »
Pour Rémy Rebeyrotte, interrogé sur le territoire d’Autun, il indique « Notre vocation est de conserver une offre adaptée à notre dimension de territoire c’est-à-dire 70 000 personnes. Autun est la 5ème ville de Saône-et-Loire, au niveau santé. Il s’agit donc d’avoir des plateaux adaptés, de répondre aux besoins de proximité d’urgence et de maternité. On est très content de travailler avec Chalon et Montceau. Tous ensemble, on se renforce pour maintenir une qualité de soins. C’est une chance. ».
Une autre question a porté sur les transports et les parkings à Chalon-sur-Saône. Gilles Platret a indiqué : « Notre souci, c’est de développer les transports en communs pour desservir l’hôpital. On a une ligne de bus allant de Champforgeuil à Lux, desservant l’hôpital. Le Grand Chalon a la responsabilité de développer les transports. Et je peux vous dire qu’on a cherché à développer des navettes. Actuellement, un travail est en cours avec la compagnie des transports en commun pour améliorer la communication sur les lignes existantes. On a des contraintes, on les connaît. Mais on a aussi une navette qui existe. Elle passe toutes les 15 minutes. ».
D’autres questions ont été posées sur le fonctionnement des urgences, avec un pic constaté dernièrement à Chalon. Bruno Legourd, Directeur de la CHT a répondu que ce pic était conjoncturel et observable dans tous les établissements de la CHT. Pour Chalon, cela avait conduit dernièrement à une communication auprès du grand public pour inciter les patients les plus légers à se rendre chez leur médecin généraliste plutôt que d’engorger les urgences.
Les unités Alzheimer ont elles-aussi fait l’objet d’échanges. Bruno Legourd a voulu là-aussi se montrer rassurant en indiquant qu’aucune des unités existantes ne fermerait. « Au contraire ! Ces troubles se développent par rapport au vieillissement de la population. » a-t-il indiqué.
Devançant la loi de santé, un montcellien a interrogé Christophe Lannelongue sur le passage de la CHT au GHT. Christophe Lannelongue a précisé que la loi n’était pas encore votée. Toutefois « si tout va bien, ce sera fait fin septembre-début octobre. La CHT Nord Saône-et-Loire est déjà bien avancée. On n’aura aucun mal à intégrer les conditions du GHT. Cette loi vise à donner un coup d’accélérateur pour inciter les hôpitaux publics à la coopération. Au fond, on a créé une dynamique de territoire, que je souhaite pour d’autres territoires ».
Par rapport à la CHT, le GHT implique un groupement d’un nombre plus important d’établissements. Si le GHT devait remplacer la CHT, cela impliquerait quatre hôpitaux locaux susceptibles de rejoindre les trois fondateurs actuels, à savoir : Louhans, Chagny, Toulon-sur-Arroux et la Guiche.
Un portail d’information pour la Bourgogne
Sur le sujet de la communication, Françoise Tenenbaum a parlé du site Ma santé en Bourgogne : http://www.ma-sante-en-bourgogne.org/
Celui-ci offre des informations et des possibilités de poser des questions. Ultérieurement, il devrait y avoir un accès possible via une application sur smartphone.
La soirée s’est achevée par des remerciements à l’ensemble des partenaires et des personnes présentes à cette soirée, ainsi qu’à celles ayant participé aux enquêtes. Les participants étaient invités à prolonger les échanges autour d’un buffet.
Émilie Mondoloni