« Lors de la rencontre avec l’Agence Régionale de Santé (ARS) du 5 novembre dernier, nous avions demandé de pouvoir être destinataires du rapport de l’Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) et de tous les documents de travail qui ont suivi ce rapport.
Le 10 novembre nous avons reçu le rapport de l’ANAP « Appui aux coopérations territoriales » du 22 juillet 2014 et le document de l’ARS présenté à l’Intersyndicale et à la Commission Médicale d’Etablissement (CME) le 7 octobre « Pour une Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) Morvan-Saône-et-Loire Nord (Autun / Chalon-sur-Saône / Montceau-les-Mines) ».
La politique nationale de santé – Le document de l’ARS (p.9) rappelle que le contexte territorial s’inscrit dans un contexte national très contraint et que le taux d’évolution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie pour les hôpitaux (ONDAM hospitalier) est fixé à 2% pour 2015 contre 2,3% en 2014. Déjà le Projet Régional de Santé (PRS) 2012-2016 parlait de contexte financier contraint, maintenant le contexte est très contraint! Le déficit de la Sécurité Sociale pour 2015 est prévu à hauteur de 15,4 milliards d’euros. Mais regardons de près. Chaque année, ce sont près de 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales qui sont consenties aux employeurs, sans que ne soient jamais exigées d’eux des contreparties claires, précises et concrètes. A ceci il faut ajouter le manque de recettes pour la Sécurité Sociale à la suite des fraudes patronales estimées, selon la Cour des Comptes, entre 16,8 et 20,8 milliards d’euros! De plus le ralentissement de l’économie engendre une diminution des cotisations sociales. Le problème de la Sécurité Sociale n’est pas avant tout celui des dépenses mais celui des recettes insuffisantes. Cette politique nationale ne fait qu’augmenter les situations de déficit comptable de nombreux hôpitaux déjà confrontés aux difficultés financières liées à la tarification à l’activité. Elle accentue les fermetures de services, les réductions de personnels et par conséquent augmente l’inégalité d’accès aux soins. Nous pensons qu’un véritable service public hospitalier doit disposer de moyens financiers suffisants pour accomplir sa mission de protection de la santé pour tous comme il est annoncé dans le préambule de la Constitution.
La politique territoriale – Notre territoire est le Nord Saône-et-Loire (NSL) et selon l’ARS la situation financière des trois CH (Autun / Chalon-sur-Saône / Montceau-les-Mines) et de la Fondation Hôtel-Dieu du Creusot est intenable. Selon les données 2012, les trois CH ont les « parts de marché » suivantes: chirurgie 16%, médecine 47%, obstétrique 55% (doc ANAP p.6). L’objectif de l’ARS est de constituer une CHT capable de « concurrencer » le secteur privé afin d’arriver à 50% d’activité en chirurgie. Selon l’ARS ce secteur est en voie de restructuration, notamment à Dijon (Générale de Santé) et au Creusot (Fondation Hôtel-Dieu) (p.25). Pour faire simple, il y aurait un seul CH englobant les trois sites, distants d’environ une heure entre eux (doc ANAP p.5). Ce super CH aurait une seule direction, un seul projet médical et toutes les autorisations de l’ARS pour exercer les différentes spécialités. Chaque site devra se spécialiser et augmenter le volume d’activité (doc.ARS p.21). L’ARS appelle aussi à sortir de la peur d’un futur « gros » Chalon (p.24). Mais regardons de près. Déjà actuellement les « poids » sont très différents: Chalon (2164 personnes, dont 250 médecins), Montceau (860 équivalent temps plein, dont 65 médecins). Le triangle risque d’être très déséquilibré, d’autant plus qu’à Chalon-sur-Saône il y a déjà l’Hôpital privé Sainte Marie, le Centre Orthopédique Médico-Chirurgical de Dracy le Fort, le Médic Center et demain, peut-être, le nouveau établissement de la Croix Rouge. L’organisation des Services des Urgences reste à définir au niveau du NSL dans le cadre des orientations de la Fédération Médicale Interhospitalière (FMIH). Le maintien du service de médecine d’urgence et du Service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) est confirmé au Creusot (doc ARS p.29)
Historique du Centre Hospitalier de Montceau-les-Mines : 1991 – création du Syndicat Interhospitalier (SIH) qui regroupe le CH Jean Bouveri et le Centre Médico-Chirurgical (CMC) Saint-Exupéry. 1998 – mise en service des nouveaux bâtiments avec un nouveau plateau technique ( 72 lits en chirurgie) et rachat de la clinique Claude Forest (20 lits). Ce rachat s’est effectué sans compensations financières nécessaires. Le nouvel ensemble assure la prise en charge de base des patients en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), ainsi que le Service des Urgences. 2007 – fermeture de l’Unité de Soins Intensifs (transformé en soins continus), pénalisant les patients (prise en charge limitée et risques accrus lors des transferts) et l’équilibre budgétaire avec la suppression d’une dotation de 350.000 – 400.000 euros par an. 2008 – l’application de la tarification à l’activité (T2A) à 100%, conduit à une diminution des recettes par rapport à 2007 de 2,91%, correspondant à 1.114.854 euros. Cette tendance s’est confirmée par la suite. (Chambre régionale des comptes) 2009 – création d’un Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) avec l’Hotel-Dieu du Creusot: fermeture de la maternité, du Service de Pédiatrie, des Urgences pédiatriques et de la chirurgie viscérale au CH de Montceau-les-Mines. La mise en oeuvre du GCS a été un échec pour les deux hôpitaux : perte de patients, éloignement de l’offre de soins, augmentation des « déficits » et abandon du projet d’un nouveau hôpital communautaire. 2011 – mise sous tutelle du CH de Montceau avec la mission de M. Métais. Celle ci s’est traduite par le non renouvellement des contrats à durée déterminée et une centaine de suppression de postes
Le Centre Hospitalier dans le cadre de la future CHT – L’ARS envisage pour Montceau une restructuration importante tournée vers un plateau ambulatoire d’excellence et une référence en gériatrie. Concrètement elle prévoit un plateau technique de chirurgie et de médecine à dominante ambulatoire, avec un pôle de référence pour la prise en charge des personnes âgées au sein de la CHT. Deux scénarii pour la chirurgie: uniquement ambulatoire ou spécialisée en orthopédie-traumatologie (ambulatoire et programmé hors permanence des soins en établissement de santé -PDSES). L’ARS prévoit: – un hôpital référent en gériatrie avec toutes les composantes de la filière – pour les autres disciplines médicales, une offre de proximité – une hospitalisation à domicile (HAD) très développée – une réflexion sur l’organisation des urgences. (doc ARS p.31,35)
Dans ce cadre l’ARS envisage un contrat de performance pour le nouvel hôpital de Montceau, dans une recherche de performance médico-économique à l’échelle de la CHT. Ceci suppose un changement en profondeur des organisations et des équipements en adéquation avec l’activité qui sera réalisée au sein du plateau technique. Selon l’ARS, c’est une « des conditions de la réussite »(p. 36) qui ajoute que « la valorisation de ces projections d’activités permettra d’aboutir à un volume cible de recettes globales sur la base duquel l’établissement doit être en capacité d’atteindre un taux de marge brute de 8% « . Cette affirmation est étayée par un tableau de simulations financières (p.38) qui nous interroge sur les modalités qui permettront d’atteindre ces objectifs. Nous y trouvons d’abord la confirmation d’une des « conditions de la réussite énoncées page 36 : « un effort important devra être réalisé afin d’adapter le volume des charges ». Cette adaptation correspond à une réduction drastique puisqu’elle atteint le chiffre de 6,5 millions d’euros en 2018! Mais de quelles charges s’agit-il? Sans aucun doute des charges de personnel qui représentent 70% du budget de l’hôpital. Il n’y a d’ailleurs pas de doute puisque l’ARS nous dit « qu’un accompagnement sera mis en œuvre afin de traiter le volet social… » (p. 36). Notre inquiétude est grande même si monsieur Jaffre nous a dit qu’il n’y aurait pas de licenciements secs mais des non remplacements de départs en retraite. D’ailleurs le non renouvellement des CDD a déjà commencé à Montceau. Une fois de plus le personnel est la variable d’ajustement alors que les conditions de travail sont de plus en plus difficiles actuellement. Supprimer du personnel alors qu’il est insuffisant c’est, selon nous, remettre en cause la qualité des soins, ce que nos ne pouvons pas accepter. Le tableau de simulations financières cité plus haut nous interpelle aussi sur les recettes annoncées pour la période 2015/2018 : elles sont quasiment constantes, 64,6M€ pour 2018 contre 64,5M€ en 2013! Ces recettes sont la traduction de l’activité et de la tarification qui va avec . Comment expliquer cette stagnation alors que l’on annonce la mise en place de « de pôles d’excellence », le retour de la chirurgie digestive et urologique, le développement de la chirurgie ophtalmologique, une coopération avec le CHU de Dijon pour l’oncologie. Ou bien ce chiffrage n’est pas crédible ou bien il est inquiétant pour l’avenir de notre CH.
Nous pouvons constater que le projet de l’ARS apporte des changements très profonds à l’actuelle structure du CH le déclassant définitivement comme hôpital local spécialisé dans l’ambulatoire et la gériatrie. N’oublions pas que M. Lannelongue, directeur général de l’ARS, parlait récemment de l’hôpital de Montceau comme d’une antenne de l’hôpital de Chalon. (jsl 31.10.14) Le temps presse! L’ARS a prévu un calendrier serré : le projet médical de la future CHT, le projet de contrat de performance, la convention de direction commune et le projet de convention constitutive de la CHT devaient être finalisés pour la mi novembre. En décembre examen par le Comité interministériel de la Performance et de la Modernisation de l’Offre de soins hospitaliers (COPERMO) du contrat de performance. Mise en oeuvre effective le 1er janvier 2015. (p.39)
A suivre… les documents ANAP et ARS sont consultables sur: http://www.lecodef.org
Réunion publique au Centre nautique de Montceau-les-Mines le lundi 22 décembre à 18 h
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